Les dépendances sportives

Si la pratique du sport est encouragée et valorisée par notre société, il apparaît que lorsqu'il est pratiqué de manière excessive il peut s'apparenter à une addiction. Une définition de l’addiction au sport a été proposée par le Centre d’études et de recherches en psychopathologie (CERPP) de Toulouse, et par les Universités de Toulouse et de Bordeaux. Elle repose sur « un besoin irrépressible et compulsif de pratiquer régulièrement et intensivement une ou plusieurs activités physiques et sportives en vue d’obtenir des gratifications immédiates et ce malgré des conséquences négatives à long terme sur la santé physique, psychologique et sociale ».

Définition

  • C’est un hyperactif qui veut donner le meilleur de lui-même, atteindre le sommet
  • Le sport va être un moyen d’apaisement, de soulagement dans une vie survoltée où l’on est épuisé psychiquement.
  • Il pense chaque jour à la pratique de sa « dose » de sport
  • Il va augmenter sa « dose » de sport au fur et à mesure
  • Il y a une impossibilité pour lui d’arrêter sa pratique même s’il se blesse
  • La frustration s’installe quand il n’a pas sa « dose »
  • Le plaisir disparaît au profit du devoir, du besoin, de la nécessité
  • La vie sociale disparaît au profit du sport
  • Le « drogué » du sport mis au repos forcé éprouvera un profond mal-être, des signes de manque (irritabilité, angoisse)
  • La vie est complètement organisée autour des activités sportives

Une partie de la population (1/3 environ) va mieux supporter une certaine dose d’activité physique. En effet, des chercheurs ont mis en évidence que lors d’une activité physique, certaines personnes secrétaient une petite protéine qui stimulait le système endocannabinoïde et créait une tolérance qui se manifestait par une augmentation régulière de l’activité physique. Nous ne sommes pas tous égaux dans la manière de secréter ces substances.

Les sportifs sont des sujets à risque sur le plan alimentaire. 13,5 % d’entre eux sont touchés par des troubles du comportement alimentaire (3,1 % pour les non sportifs). Les sportifs les plus touchés font partie des catégories suivantes : les sportifs jugés sur leur apparence physique (gymnastique, patinage, natation synchronisée), les sports où la perte de poids permet de meilleures performances (natation, courses de fond (course à pied, ski de fond), saut à ski), les sports à « catégories de poids » (sports de combat, aviron…).

Il va tout sacrifier pour le sport. Cette pratique intensive pourra être la source de différents troubles : troubles anxieux, avec parfois une névrose d’échec et/ou une anxiété de performance et également des troubles du comportement alimentaire.
Ce sportif qui a eu beaucoup de satisfaction dans sa carrière, une vie « non ordinaire », médiatisée, entièrement rythmée par les entraînements et les compétitions deviendra très vulnérable au moment de l’arrêt de la pratique. C’est la fin des « shoots » d’adrénaline et de la sécrétion d’endorphines que procurent le sport. C’est le vide par rapport au plein d’émotions fortes. Pour combler ce manque, certains voudront continuer à ressentir ces effets en consommant des produits (alcool, cocaïne, autres produits stupéfiants…).

Si émotionnellement, le sportif de haut niveau n’a pas la capacité à gérer ses victoires comme ses succès pendant sa carrière cela peut amener à des gestes irréparables. Les ruptures sont des moments de fragilité. A l’arrêt de la carrière, il faut trouver des relais de satisfaction qui devront remplacer les sensations du sport de haut niveau.

Une étude française a révélé que 32,9 % des athlètes de haut niveau souffraient d’un trouble du comportement alimentaire. Il existe également chez ces athlètes plus de symptômes dépressifs, ainsi qu’une perte de confiance en soi, une insatisfaction corporelle, des comportements de dopage.

 

La bigorexie

C’est une addiction à la prise de masse musculaire. Cette addiction a d’abord touché les culturistes. La personne est obsédée par l’image de son corps qui lui semble insuffisamment musclé et pour combler cette mésestime corporelle, elle va s’adonner à une pratique intensive, souvent dans les salles de sport et de musculation avec, en parallèle, une alimentation hyperprotéinée et même à l’extrême la prise de substances dopantes anabolisantes.

 

Prévalence

Les pourcentages d’addiction au sport sont très variables selon les outils d’évaluation utilisés. Dans la littérature on trouve les chiffres de 3 %, de 5 à 7%, 9%, 17 %, 20%, 30 %, 34 %, et même au-delà de 42 %.
Lors d’une enquête réalisée en Hongrie sur 474 personnes âgées de 18 à 64 ans, on a recensé entre 1,9 % et 3,2 % d’addicts chez des sportifs qui faisaient régulièrement du sport dans la semaine. Sur 600 personnes regroupées pour un stage au Centre national d’entraînement commando, 7,8 % présentaient une addiction au sport.

Les conséquences physiques
La personne va au-devant de problèmes musculaires, tendineux, osseux (fractures de fatigue). Plus elle persiste dans son activité, plus elle va ressentir de l’épuisement. Cela peut aller jusqu’à l’infarctus. Souvent le sport excessif va de pair avec des obsessions alimentaires : alimentation hyperprotéinée donc déséquilibrée. Il pourra y avoir une perte de minéraux, une déshydratation, une perte de poids importante.

Les conséquences psychiques
L’arrêt du sport va engendrer des manifestations psychiques identiques au manque des patients alcoolodépendants et polytoxicomanes en sevrage (angoisse, irritabilité).

La pratique sportive excessive va mettre la personne dans un isolement social. Si elle ne peut plus faire de sport, elle va développer des symptômes dépressifs, voire des idées suicidaires.
Les addicts au sport pourront alors se tourner vers l’usage d’alcool ou autres drogues à visée autothérapeutique afin d’atténuer leur mal être.
 

Prise en charge

Il faut parvenir à faire un repérage précoce. Les centres spécialisés comme les antennes médicales de prévention du dopage, les centres d’accompagnement et de prévention pour les sportifs (CAPS) prennent en charge les « addicts » au sport.

« Le sportaholic » doit être évalué sur les plans physique et psychologique. La prise en charge avec une psychothérapie comportementale va être la base du traitement.

Depuis 2006, le Ministère de la santé et des sports a instauré un bilan psychologique systématique,entrant dans le cadre du suivi médical réglementaire (SMR) de tous les sportifs de haut niveau. L’objectif de ce bilan psychologique est de prévenir et de déceler des difficultés psychologiques liées à une pratique sportive intensive, et de repérer les sportifs à risque de développer une addiction ou une complication psychiatrique (trouble anxieux et épisode dépressif, principalement). Ce bilan doit être réalisé une fois par an pour les sportifs majeurs et deux fois par an pour les mineurs, plus vulnérables sur le plan psychologique.

 

Pour en savoir plus :